Rondo', d'Olivier Van Maldergem
En musique classique, le rondo est basé sur l'alternance de couplets et d'un refrain. Quittant rarement la tonalité principale, le refrain commence et termine la consécution d'ordinaire suivie d'une coda (passage terminal d'une pièce ou d'un mouvement). Les couplets sont thématiquement et rythmiquement contrastés, dans les tons voisins, empruntant parfois à l'écriture de la variation.
Après des études de philosophie puis de montage à l'INSAS, Olivier Van Malderghem a participé à la création de quelques œuvres cinématographiques, dont Toto le héros, et est l'auteur de deux courts métrages en tant que réalisateur : L'arbre au chien pendu (2000) et Une fille de joie (2002). En 2010, il signe un documentaire intitulé Hors limites, le cinéma de Jaco Van Dormael.
Rondo est son premier long métrage de fiction.
Ce coup d’essai est un véritable coup de maître.
Un pur chef-d’œuvre !
Belgique, 1943. La situation devient insupportable pour la famille Field : les persécutions antisémites deviennent quotidiennes et de plus en plus violentes. Joseph Field, le père de Simon, se rebelle contre l'armée occupante. Il est arrêté et déporté. Esther, sa femme, décide de passer dans la clandestinité.
Resté seul, le jeune Simon rejoint son grand-père, Abraham, en Angleterre. Ce dernier est professeur en exégèse à l’université de Cambridge. Le grand-père et son petit-fils sont juifs, mais aucun d’entre eux ne s’accorde avec l’autre sur ce que cela signifie. C’est l’un de leurs nombreux points de discorde : ils ne s’entendent pas sur grand-chose.
Quand ils apprennent l’holocauste, et donc la disparition probable de leurs proches, ils oublient en partie leurs querelles et tentent d’unir leurs forces… Il faut désormais faire face à cette réalité insupportable.
À travers la figure de Simon (Julien Frison) et de son grand-père Abraham (Jean-Pierre Marielle), réfugiés en Angleterre, le film raconte la crise mystique du monde juif face à la découverte de la Shoah. « Pourquoi Dieu nous a-t-il abandonnés ? », demande Simon. « Appelle-moi Mike, je ne suis plus juif », répond Marielle.
Mélangeant les registres, Rondo parvient de manière touchante et émouvante à confronter notre « enfance » à l'horreur de la Shoah.
Tout en rappelant tour à tour Le vieil homme et l’enfant de Claude Berri, La vie est belle de Benigni, ou encore Au revoir les enfants de Louis Malle, le film pose un certain nombre de questions. Le peuple juif est-il encore le peuple élu de Dieu ? Le Messie viendra-t-il quand même ? Autant d’interrogations qui habitent l’âme d’Abraham et de son petit-fils. Par-delà celles-ci, l’auteur universalise l’horreur de la Shoah à l’humanité tout entière.
La dédicace finale nous rappelle que tous, nous sommes susceptibles de perdre un enfant, un parent ou un proche et d’être ainsi confrontés à l’interrogation de Simon. Pourquoi Dieu, après avoir refusé le sacrifice du patriarche Abraham, permet-il au fil des siècles le massacre de milliards d’innocents ? Un autre Abraham, le grand-père, cet exégète des textes anciens, répond à cette interrogation. En fait, Dieu est fou ! Seule réponse possible par rapport à l’horreur des camps d’extermination et... à la mort de nos enfants. Outre le propos philosophique, notons également la remarquable direction d’acteurs. Jean-Pierre Marielle interprète avec sobriété l’un de ses plus beaux rôles et Julien Frison est manifestement la nouvelle révélation du cinéma belge. Bref, du très grand cinéma réalisé avec peu de moyens, mais beaucoup d’intelligence !
Joël Saucin
Extrait vidéo
Plus d'infos sur le film
Lire quelques réactions (presse et spectateurs).
Rendez-vous sur le site dédié : http://www.rondofilm.com?
Projection et débat
Le film sera projeté à l'IHECS le jeudi 8/12 à 20 h 00. La projection sera suivie d'un débat avec le réalisateur et l'acteur principal, Julien Frison. Intervention de Frank Pierobon, professeur à l'IHECS. Entrée libre.