Mammouth
Des nouveaux droits pour les coursiers Uber ?
Une nouvelle législation européenne visant à garantir la protection des travailleurs de plateformes numériques, tels que Uber et Deliveroo, a vu le jour le lundi 14 octobre 2024. Le texte prévoit de réguler le secteur en requalifiant comme employés les livreurs et coursiers actuellement classés sous le statut d’indépendants.
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Streaming: la nouvelle frontière de l’éducation
Pendant le confinement, les étudiants du supérieur ont découvert le streaming et les cours en ligne, mais est-ce encore une méthode d’enseignement à conserver ? Aujourd’hui, ces méthodes font débat au sein des universités et des hautes écoles. Certains continuent à les utiliser et d’autres les ont abandonnées.
En 2024, plusieurs études montrent que les cours en ligne ont eu un impact significatif sur la motivation des étudiants de l’enseignement supérieur en Belgique. En effet, 81 % des étudiants déclarent ressentir une perte de motivation en raison de l’enseignement à distance, entraînant un sentiment de décrochage pour beaucoup d’entre eux.
Par ailleurs, 62 % des étudiants préfèrent assister à des cours en présentiel lorsqu’ils en ont la possibilité, bien que certains continuent de suivre des cours en ligne, que ce soit par choix ou par nécessité.
Les défis psychologiques, tels que l’anxiété et la dépression, sont également très présents, accentués par l’isolement et le manque de contacts sociaux. Ces données mettent en lumière l’impact important de l’enseignement à distance sur la motivation et le bien-être des jeunes.
Nous avons été à la rencontre d’étudiants pour avoir leur ressenti face à la question. Certains professeurs nous ont aussi donné leur avis pédagogique sur cette nouvelle façon d’enseigner.
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La fièvre du vinyle
Dans ce podcast, partez à la découverte des jeunes collectionneurs de vinyles et d’éditions limitées. Ils nous racontent leurs trouvailles, leurs anecdotes et partagent leur passion pour ces objets uniques. Plongez dans un univers où chaque disque raconte une histoire et où la quête du collector prend tout son sens !
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Un people sur l’affiche électorale
Depuis une vingtaine d’années, un phénomène particulier attire l’attention lors des élections en Belgique : la candidature de personnalités issues du monde du sport, de la télévision ou encore de la musique. La présence de ces lapins blancs sur les listes électorales suscite enthousiasme, curiosité, mais aussi scepticisme.
Qu’est-ce qu’ont en commun Silvio Proto, Walter Baseggio, Charline Van Snick, Yves Coppieters, Ysaline Bonaventure, Romain Thiry, Sandra Narcisi, Aisling D’Hooge ou encore Denis Collard ? Ce sont des “lapins blancs”. Ce terme fait référence à des personnalités publiquement reconnues, qui sont utilisées par des partis politiques pour attirer l’attention du grand public. Il s’agit d’une “peopolisation” de la politique.
Comment ces nouveaux influenceurs façonnent-ils la politique affinitaire ? Et quels sont les enjeux démocratiques derrière ce phénomène ?
D’un conte à un phénomène politiqueMais pourquoi ce terme de lapin blanc ? Dans le livre Alice aux pays des merveilles de Lewis Carroll datant de 1865 , le lapin blanc intervient dès le premier chapitre, où il interpelle Alice en lui disant : “En retard, toujours en retard”. En le suivant, Alice tombe dans le trou et se retrouve au pays des merveilles. Aujourd’hui la signification du “lapin blanc” est une personne sans réel contact avec la politique, surgissant du néant comme dans un tour de magie, et qui se retrouve propulsé sur le devant de la scène.
Ces dernières années, le phénomène du “lapin blanc” a pris de l’ampleur en Belgique. La lutte pour capter l’attention des électeurs est de plus en plus intense, alors même qu’une partie de l’électorat se détourne de la politique, alors même qu’une partie de l’électorat se détourne de la politique. Les lapins blancs sont donc devenus une solution stratégique, comme le souligne Thomas Gadisseux, journaliste politique à la RTBF : “Il faut arrêter de faire les bisounours, à un moment donné, on vote pour des gens. On ne vote pas pour des robots, on ne vote pas pour des programmes. On vote pour des personnages qui portent des idées et il faut que ces personnages parlent aux gens. Si on n’a que des technocrates super brillants, mais qui ne parlent pas aux gens, ça ne fonctionnera pas. Et donc c’est pour cela qu’on a besoin de personnes qui sortent un peu des cases. Il faut des personnages connus, un peu bling-bling… Il faut un mariage entre le public et la politique”. Pour lui, leur renommée ne les empêche en rien d’avoir une véritable culture politique et des idées à défendre. Mais il est clair que leur présence sur les listes est avant tout stratégique.
« Il faut arrêter de faire les bisounours, à un moment donné, on vote pour des gens […] Si on a que des technocrates super brillants, mais qui ne parlent pas aux gens, ça ne fonctionnera pas. Il faut des personnages connus, un peu bling-bling »
Thomas GadisseuxÀ partir des années 1980-1990, les partis politiques ont pris conscience que la popularité et la personnalité publique étaient des leviers pour obtenir plus de visibilité et pour séduire l’électorat. Les médias de masse ayant beaucoup d’influence, des personnalités médiatiques, des journalistes et des animateurs de télévision ont été appelés sur les listes.
Un exemple est celui de l’ancien sélectionneur des Diables rouges et joueur emblématique du Standard, Marc Wilmots. En 2002, lorsqu’il s’affiche sur la liste du MR, il fait partie des recrues les plus populaires, lui ayant obtenu un nombre impressionnant de voix de préférence. Cependant, même si c’est une personnalité publique, il n’a pas atteint le succès espéré, étant inadapté au monde politique.
Avec l’avènement d’Internet et des réseaux sociaux dans les années 2000, cette stratégie a pris une toute nouvelle dimension. La viralité des réseaux sociaux permet à ces candidatures d’atteindre un bien plus large public.
Ce phénomène n’est pas propre à la Belgique francophone. On l’observe aussi du côté flamand, mais avec quelques différences. “En effet dans le nord du pays, les personnalités, on les appelle les BV, les bekende vlamingen. C’est assez amusant, parce que là, le mouvement va aussi dans l’autre sens : des personnalités politiques deviennent des BV. Ils deviennent presque des protagonistes d’émissions de télé-réalité ou d’émissions de divertissement. Il n’y a pas vraiment cette nécessité d’aller chercher des gens du star-system pour étayer les listes politiques” nous dit Nicolas Baygert, docteur en information et en communication et intervenant politique sur LN24.
Cela s’applique aussi en dehors de nos frontières : “En France, du côté du Rassemblement National, il y a quelques anciens journalistes dont le visage a un peu marqué l’opinion, mais ce n’est pas comparable avec ce qu’on connaît ici en Belgique. Il y a aussi évidemment le cas connu de Zelensky. On a aussi plein d’exemples de clowns qui arrivent en politique, en quelque sorte. Je pense à Beppe Grillo en Italie ou encore Coluche en France. Aux États-Unis, c’est vrai qu’il y a aussi certaines traditions, notamment côté républicain. Ronald Reagan, par exemple, est un ancien acteur. Mais je dirais que ce n’est pas un phénomène systémique. C’est vraiment des choix des personnes à un moment donné qui se disent “moi je vais aller en politique, je vais défendre quelque chose, des idées”.
Mais en considérant les cas à l’international, l’expert politique relève toutefois une particularité sur notre territoire. “En Belgique, les partis vont vraiment sélectionner et chercher des gens connus. C’est moins une démarche volontaire de la part des personnalités. Nous avons un écosystème particulier”. Malgré sa petite taille, la Belgique possède beaucoup de niveaux de pouvoir et donc, de nombreux postes à combler.
“En Belgique, les partis vont vraiment sélectionner et chercher des gens connus. C’est moins une démarche volontaire de la part des personnalités”
Nicolas Baygert Un lapin de différentes couleursLe phénomène de lapin blanc s’applique surtout aux partis historiques et installés depuis longtemps, relève Thomas Gadisseux. Les plus petites listes n’ont pas les moyens d’attirer certaines célébrités, car elles ont moins d’avantages à leur proposer en contrepartie de l’image dégagée et des voix rapportées. “Il faut leur amener des bonbons”. Comprenez, une bonne place sur une liste, et un mandat à la clé.
Derrière cette stratégie, Nicolas Baygert note que Georges-Louis Bouchez, par exemple, utilise ces recrues pour renforcer son autorité interne, s’assurant ainsi leur loyauté. Cette approche permet au MR de compenser la difficulté à former des « bêtes politiques » après plusieurs années dans l’opposition.
Mais qu’en pensent les personnalités de ce parti concernées par cette stratégie ? Denis Collard, présentateur météo à la RTBF et élu à Bertrix ainsi que Aisling D’Hooghe, hockeyeuse internationale et échevine à Waterloo, affirment que leur engagement en politique dépasse la simple volonté de « faire office d’attrape-voix ». Pour Denis Collard, l’envie de s’impliquer est avant tout motivée par un engagement personnel. Sa notoriété lui permet peut-être de gagner en visibilité, mais il estime que son impact reste limité.
Chez Les Engagés, la démarche est assez similaire, avec des recrutements comme celui d’Yves Coppieters, qui permettent au parti de se différencier de son héritage CDH en misant sur des profils issus de la société civile. François Desquesnes, Vice-ministre-président et ministre à la Région wallonne estime que “ces personnalités publiques apportent une expertise, un avis, une expérience dans un certain domaine d’action”.
En revanche, des partis comme Écolo et le PS se montrent plus réservés. Antonio Solimando, porte-parole d’Écolo, insiste sur l’importance de recruter des candidats qui portent un projet concret, et non uniquement des figures populaires. Du côté du PS, la tradition repose davantage sur la promotion interne de militants qui gravissent petit à petit les échelons au sein du parti. Cette approche vise à « fabriquer des bêtes politiques » à travers un long parcours, plutôt qu’à attirer des célébrités.
Enfin, le PTB n’adopte pas cette pratique mais ne s’y oppose pas non plus. “C’est même positif que des personnalités qui ont une certaine opinion la révèlent clairement” déclare Germain Mugemangango, député wallon et membre du PTB. Cependant, très peu de personnalités publiques sont présentes sur ces listes. “En s’alliant au PTB, sans mauvais jeu de mots, tu es marqué au fer rouge” explique Nicolas Baygert. Selon lui, le parti va plus chercher des jeunes qui sont actifs dans la militance.
“Est-ce que ma petite notoriété acquise permet d’avoir plus de votes ? J’imagine que cela peut un petit peu jouer, mais dans mon cas, pas énormément”
Denis CollardLa montée en puissance de ce phénomène de “lapins blancs” reflète une transformation fondamentale dans la façon dont la politique belge est perçue et vécue par les électeurs.
En intégrant des personnalités venant des domaines comme le sport, la culture, les médias, on remarque que les partis visent à rendre la politique plus accessible et engageante pour un électorat souvent déconnecté du paysage politique.
Mais derrière cette stratégie, certaines questions persistent. Ces personnalités apportent-elles vraiment une plus-value politique ou sont-elles mises en vitrine pour servir d’attrape-voix ? Les partis ne répondront jamais réellement à cette question et argumentent qu’il faut répondre à des “compétences” pour pouvoir être “repris” sur les listes, laissant tout de même un flou sur leurs réelles intentions à propos de l’utilisation de ces lapins blancs. Un jeu politique certain, mais qui soulève pas mal de questions éthiques en ce qui demeure être le choix le plus important des citoyens dans notre société démocratique.
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Naviguer sans voir
Gérard est presque aveugle depuis 4 ans et, pour survivre, il a dû s’adapter. Lors d’un trajet de son appartement à la station de métro la plus proche, il nous partage son quotidien dans une société de plus en plus hostile envers les malvoyants.
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Sortir de la mêlée
Historiquement, le rugby n’est pas un sport qui passionne les Belges. A tel point que certains des meilleurs rugbymen belges ont fini par préférer représenter l’équipe de France plutôt que la Belgique. À travers ce podcast, nous tenterons de comprendre pourquoi le ballon ovale ne déchaîne pas (encore) les foules dans le plat pays.
En février 2024, l’équipe nationale belge de rugby à réalisé l’exploit de battre le Portugal lors d’un match de qualification pour la phase finale du tournoi des VI Nations B. Pourtant, cette victoire n’a été que très peu médiatisée. Afin d’en savoir plus sur l’état du développement du rugby en Belgique, nous avons interrogé Gauthier Baudin, un journaliste qui a documenté et vécu la victoire contre le Portugal de l’intérieur.
Dans ce podcast, nous tenterons également, avec l’aide de l’historien du rugby Joris Vincent, de vous offrir un éclairage sur l’aspect historique de la diffusion du rugby à l’international. Ces explications vous permettront de comprendre comment les relations internationales de la Belgique ont favorisé un développement du football plutôt que du rugby.
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Les jeunes lisent-ils encore ?
Toi aussi, tu as l’impression que les jeunes ne lisent presque plus ? Avec les réseaux sociaux, les écrans et les jeux vidéo, la lecture a du mal à se détacher du lot. Mais est-ce vraiment le cas ? Nous avons décidé de mener l’enquête en donnant la parole aux premiers concernés.
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Pourquoi tous les cafés se ressemblent ?
© Louise Durieux
Capitale, Drache, Crème, Bouche… Éparpillés un peu partout dans Bruxelles, ces cafés ont, à quelques détails près, la même carte et une ambiance similaire, que certains jugeront « bobo » ou « tendance ». Au fil des mois, le nombre d’enseignes de ce type ne fait qu’augmenter. Assiste-t-on à une uniformisation de nos cafés ?Vous entrez dans un café et découvrez des murs blancs, des plantes à profusion, une lumière tamisée, une ambiance décontractée, une carte proposant matcha, lait de soja et ‘carrot cake’, un jeune serveur qui vous tutoie… Dans le fond de la salle, un vinyle tourne et ponctue de musique cette atmosphère tendance.
Insta(gramme) pèse dans la balanceIl est indéniable que l’esthétique d’un lieu est devenu un critère primordial. Selon une étude de visit.brussels en 2021, le cadre est le premier critère de sélection pour le choix d’un coffee shop, et ce avant même les tarifs et la carte proposée. Cette importance du cadre est en grande partie due aux réseaux sociaux.
En effet, depuis quelques années, nous entrons dans une société de recommandation. Grâce au smartphone, la clientèle a plus de prise sur le processus de choix d’un café. Le marketing en est transformé, il ne repose plus uniquement sur les marques pour promouvoir leur enseigne, mais s’appuie aussi sur les individus – influenceurs aussi bien que simples consommateurs – partageant leurs découvertes à leur réseau virtuel.
Ce phénomène a lieu en grande majorité sur TikTok et Instagram. On a tous déjà vu défiler ces vidéos montrant des cafés bruxellois dans notre feed. L’attractivité de ces lieux est étroitement liée à leur potentiel “instagrammable”. Aujourd’hui, il est devenu rare de rentrer dans un café trouvé par hasard. Nous choisissons plutôt un lieu en fonction des expériences que nous avons vues en ligne, cherchant plus ou moins consciemment à recréer ces moments partagés sur les réseaux sociaux. Et qui sait, peut-être à notre tour, alimenter nos propres publications sur ces plateformes.
Aller au café, pour quoi faire ?Si les réseaux sociaux ont joué un rôle, les envies et les habitudes des Belges ont aussi beaucoup évolué ces dernières années, de même que la manière d’investir un café. Par exemple, avant le Covid, beaucoup de gens avaient l’habitude d’aller prendre leur café avant d’aller travailler. Depuis lors, le télétravail s’est imposé et les laptops ont pris leur place dans les bars. L’afflux des clients s’est réparti sur la journée, et la durée de leur visite est aussi plus longue.
“Les gens viennent travailler quelque part, consomment un café et un croissant et pensent qu’il leur est permis de rester cinq heures, mais ça ne couvre pas nos coûts, il y a une raison pour laquelle un espace de coworking demande 50 euros par demi-journée”, explique Loïc Installé, gérant du Belga & Co – situé à Bailli. Certains clients ont d’ailleurs déserté les cafés, car le côté social et chaleureux était mis en péril. Pour pallier cela, des cafés – dont Belga & Co – ont décidé d’instaurer une ‘laptop policy’. Un bon moyen de refaire des cafés un espace d’échange social et non pas seulement un espace de coworking.
Ces espaces d’échange social, beaucoup ont voulu en devenir les gérants. Ils ont donc surfé sur la vague et cela explique pourquoi le nombre de cafés tendances a explosé dans certains quartiers. Pas de quoi avoir peur pour Loïc Installé : “Il y a plus d’offres qu’il y a huit ans, c’est certain. Cela ne veut pas pour autant dire qu’il y a plus de concurrence, car la demande elle aussi a énormément augmenté”. Pour autant, Loïc le sait: “personne n’est fidèle à un café”. Il ne peut donc pas se reposer sur son ancienneté et la réputation qu’il a pu se créer ces dernières années.
Café bobos : indicateurs de gentrificationL’apparition de ces cafés n’est pas qu’une mode, elle est aussi liée à un phénomène bien connu de la capitale belge : la gentrification. Pourtant, ces cafés n’ont pas forcément l’intention consciente de viser uniquement un public aisé. Certains gérants affirment même qu’ils favoriseraient la création de liens et la mixité sociale au sein du quartier dans lequel ils s’implantent. Le problème est que, souvent, les habitants des quartiers sont exclus par les prix pratiqués. En proposant de prix qui ne sont pas en ligne avec les revenus des habitants, les cafés contribuent à accroître la polarisation entre les différentes classes sociales d’un quartier. En d’autres termes, ils peuvent favoriser l’embourgeoisement au lieu de créer de la mixité. Sur le long terme, l’installation massive de lieux branchés provoque même une hausse du prix de l’immobilier et du coût de la vie dans les quartiers concernés.
Un phénomène que connaît bien Gwenaël Breës, qui a coécrit en 2013, le dossier « Service au bar », qui aborde notamment l’apparition de cafés branchés à Bruxelles et l’absence de mixité sociale qui s’y opère. « Un endroit n’est jamais neutre. Si vous faites des chai latte à cinq euros et des très bonnes soupes bio à neuf euros, ça attirera un public différent que si vous diffusez des matchs de foot avec des bières à deux euros« .
Faites le test !Nous avons voulu vérifier nos questionnements sur le terrain. Nous avons été prendre des photos dans ces nouveaux cafés tendances et nous les avons comparées avec celles de quelques années auparavant dans ces mêmes lieux. Le constat est sans appel: restaurant, chocolaterie, bar à bières ont laissé place à ces cafés prisés. Voyez par vous même en glissant le bouton blanc de gauche à droite.
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Les mains dans la terre
Photo : Arthur Dumoulin
Là où certains voient de l’argile, elle y voit des histoires. Plongez dans l’univers de Véronique, où chaque création évoque un récit particulier.
Vendredi 28 octobre, au petit matin, Véronique Bogaerts nous a ouvert les portes de son atelier et nous a fait découvrir cet univers qu’elle chérit tant, celui de la céramique. Entre voyage mémorable et passion de la terre, Véronique nous conte son histoire unique et comment elle est en venue à ouvrir son atelier de céramique, ici, à Wezembeek-Oppem.
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Le matcha, un business hyper tendance
Vidéo par Mia Hodzic, Arthur Dumoulin et Lilou Vanderheyden
Vert vibrant et riche en antioxydants, le matcha s’impose aujourd’hui comme la boisson star des réseaux sociaux. Devenu incontournable dans les cafés et sur nos feeds, il intrigue par ses prix qui varient du simple au décuple. Qu’est-ce qui justifie ce succès fulgurant ? Qu’est-ce qui différencie un matcha bon marché d’un matcha premium ? Dans ce reportage, nous avons rencontré des experts pour lever le voile sur cette poudre verte aux multiples secrets.
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La Potion Virtuelle
sur les réseaux sociaux !
Illustration par Sophie Segura
Il était une fois, des femmes qui traversaient la nuit sur leur balais magique… Aujourd’hui les sorcières ont pris des visages bien différents que ceux que les contes nous décrivent, mais elles n’ont pas pour autant perdu leur magie ! Pas besoin de grimoire, un téléphone suffit pour t’ensorceler. Avec ses millions de vues sur TikTok, la sorcellerie semble plus que jamais s’imposer comme une nouvelle tendance. Pourtant, les racines des ces pratiques sont bien plus profondes.
Que révèlent vraiment ces croyances de notre société ? Le podcast La Potion Virtuelle vous explique ce phénomène !
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Refoodgees, un restaurant engagé
Photo : Elise Henry
C’est au cœur de Saint-Gilles, rue Émile Féron, que se situe Refoodgees, un restaurant d’insertion socio-professionnelle destiné à aider les personnes réfugiées. Entre croustillant et salade de poulpes, nous sommes allés à leur rencontre.
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Se coiffer de confiance retrouvée
Photos: Arthur Dumoulin
Octobre Rose prend le temps de souligner l’importance de la prévention pour les femmes touchées par le cancer du sein. Chaque année, plus de 10 000 femmes traversent l’épreuve de la perte de cheveux, une étape marquante et souvent difficile. Pour ces patientes, perruques et turbans ne sont pas seulement des accessoires de mode, mais de véritables compagnons de route et outils de reconstruction, leur permettant de retrouver confiance en elles.
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Jobs étudiants : la fin des 600 heures ?
crédit photo: chatGPT
Suite à la crise sanitaire, le gouvernement fédéral avait permis aux étudiants de travailler jusqu’à 600 heures par an. Mais cette mesure n’était que temporaire et devait prendre fin en janvier 2025, sauf décision contraire. Le MR dit souhaiter une augmentation du nombre d’heures autorisées à 700 heures, tandis que du côté des syndicats étudiants, la FEF estime que le job des étudiants, c’est d’étudier.
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Un accompagnement face au cancer du sein
Photo : Marie-Paule Meert (CC BY NC SA)
78 401, c’est le nombre de diagnostics de cancer du sein pour 2023. Think Pink et l’Octobre Rose mettent en lumière les maisons dédiées à la reconstruction et au soutien des personnes en convalescence. Ça fait maintenant 11 ans que Marie-Paul, cofondatrice de l’une de ces maisons, accompagne les femmes dans leur chemin vers la guérison. Grâce à elle et à ces lieux d’espoir, beaucoup retrouvent confiance et sérénité après l’épreuve du cancer.
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Habitats part’âgés
Les personnes âgées représentaient en 2023 environ 20% de la population belge. Avec les années, cette proportion ne fera qu’augmenter et posera nouveaux défis, par exemple en termes de logement. À mi-chemin entre le domicile et l’institutionnalisation, l’habitat partagé fait son apparition. Quelles sont ses conditions financières ? Quelles différences y a-t-il avec les homes ?
Un gros pull bordeaux sur le dos. Des manches retroussées qui laissent apparaître un chemisier fleuri rose et gris. Jeannine sourit. Une longue piste rouge sépare les deux équipes: les canaris et les zinnekes. « Attends, je vais traverser la mer rouge », dit-elle en allant rejoindre des copines de l’autre côté. Une aînée s’avance lentement, boules de pétanque posées sur le déambulateur. « On n’a qu’une heure », s’empresse de préciser un résident. Des applaudissements pour le gagnant. Une boule dans chaque main, Jeannine lâche : « elle est ma boule, celle-là ».
Partie de pétanque chez les petites soeurs des pauvres dans l’après-midiJeannine est arrivée chez les Petites Sœurs des Pauvres il y a un an. Cette communauté des Marolles (Bruxelles) se met, depuis 1854, au service des personnes âgées issues de la pauvreté. Elle y a emménagé de son plein gré. « Tu es libre, mais tu es quand même observé », nuance-t-elle. Ambulances et pompiers sont venus la chercher à son domicile. Elle est restée un mois à l’hôpital suite à une anémie. « Je ne souffrais pas, mais j’étais en danger de mort ». À 85 ans, elle trouve désormais plus sécurisant d’être dans un habitat collectif.
Selon une étude de l’Observatoire de la Santé et du Social, un Bruxellois de 65 ans et plus sur cinq ne peut pas (ou à peine) compter sur d’autres personnes en cas de problèmes. La majorité des personnes âgées en maison de repos s’y trouvent moins pour des problèmes de santé que pour la peur d’éventuels soucis à venir. Certains résidents ont été victimes de vol ou d’agression dans la rue. D’autres n’ont plus de famille à proximité et n’ont plus personne sur qui compter. La structure de la société a changé, et les personnes sont davantage isolées aujourd’hui qu’hier. Un peu plus d’un tiers des Bruxellois âgés de 65-79 ans (et presque la moitié des Bruxellois âgés de 80 ans et plus) vivent seuls. Entre des familles scindées et des enfants qui partent vivre à l’étranger, les personnes âgées se sentent délaissées.
Portrait de Jeannine dans sa chambreLa participation comme moteur
Giuseppe, lui, s’est installé il y cinq mois dans un immeuble à Etterbeek. Divorcé, il cherchait un projet dans lequel se lancer, mais qui lui garantissait des moments d’intimité. « Ici il y a une partie privée qui nous permet de mener des activités extérieures », explique cet homme vêtu d’un petit chemisier à carreaux, pull en V et lunettes sur le nez. Son habitat, autogéré par des seniors, est né en 2004 à l’initiative d’Abbeyfield, une ASBL qui propose des habitats groupés participatifs et locatifs. Aujourd’hui, elle compte 12 maisons en Belgique, dont 3, à Bruxelles. Au sein de cette maison gérée par la commune, huit appartements ont été aménagés. Guiseppe dispose d’un living avec cuisine équipée, une chambre à coucher, d’une salle de douche et d’une cave. Une chambre d’ami est aussi de mise. À 71 ans, il a trouvé un compromis entre le domicile et la maison de repos. Abbeyfield n’est pas une « institutionnalisation », comme on dit pour désigner le placement dans un home. En mettant ses résidents au centre de l’organisation, le projet leur donne le pouvoir de décision. Pour postuler, il faut envoyer une lettre de motivation, qui est suivie d’une consultation chez le médecin et d’une période d’essai de 15 jours. Une validation doit être donnée par les habitants et le conseil d’administration.
Salon de Giuseppe
Un comité participatif est aussi organisé trois fois par an chez Jeannine. Composé de sept résidents volontaires, il aborde un tas de sujets. – mais anonymement. Un résident italien désirait avoir de la sauce italienne sur ses pâtes et quelques jours plus tard, il en avait. Différents services sont aussi demandés aux résidents, comme la préparation de tartines distribuées aux pauvres à midi, l’organisation de la messe ou la gestion de la bibliothèque. Jeannine arrose les plantes du couloir qui mène au réfectoire. La sœur qui s’en chargeait a des douleurs au dos. « Je vais le faire pour toi, mais quand tu reviens, c’est fini », dit-elle d’un ton décidé. Elle se sent utile en aidant les autres résidents. « Moi je fais du bénévolat sans le savoir, mais je ne dépends de personne », dit-elle.
Dans l’habitat de Giuseppe, des repas communautaires sont organisés le lundi et le vendredi soir. Chaque résident cuisine à tour de rôle. Lui qui est originaire d’Italie a préparé des boulettes siciliennes. Œuf, formage, persil. Réunis autour d’une table recouverte d’une nappe jaune canari, ses colocataires étaient ravis. Une fois par mois, un comité discute du futur de la communauté. Cette semaine, la liste des tâches a tourné. Giuseppe s’occupe de contacter des ouvriers en cas de difficulté. Il est expérimenté. Peindre des appartements et des maisons, c’était sa profession. Une responsabilité est attribuée à chaque résident en fonction de ses capacités, qu’il s’agisse de l’entretien du jardin, coordination, trésorerie. On change de coordinateur tous les trois mois pour éviter tout jeu de pouvoir.
Portrait de Giuseppe dans sa chambre
Accessibilité financière
Dans les habitations Abbeyfield, une participation aux frais est demandée. À Bruxelles, le montant tourne autour de 860 euros. Les frais varient d’une maison à l’autre. Le loyer, les repas en communauté ainsi que les choses à réparer peuvent faire monter la facture. D’après l’Observatoire de la Santé et du Social en région bruxelloise, le prix mensuel à charge d’un résident de maison de repos en 2014 s’élevait en moyenne à 1.356 euros. En 2020, les prix de 40% des structures à Bruxelles excèdent les 2.000 euros par mois, des prix qui ont fortement augmenté ces dernières années.
Pour ses dépenses, Jeannine s’en est remise à sa nièce. Elle lui fait confiance. Chez les petites sœurs des pauvres, une messe est célébrée chaque jour à 11h, au premier étage. Les résidents sont libres d’y participer, et elle aime se rendre dans la grande chapelle composée d’un autel et de quatre rangées de bancs en bois. Au pied d’une grande croix, trois prêtres se tiennent debout devant l’assemblée. Des sœurs se sont installées sur la rangée de gauche. Enjouée, une sœur chante dans un micro et une autre joue du piano. Élisabeth, une résidente que Jeannine a décidé de prendre sous son aile, vient s’asseoir à côté d’elle. Avec son tempérament, Élisabeth a du mal avec les autres résidentes, mais avec Jeannine, cela se passe bien pour le moment. « Jésus est le chemin qui va nous donner le sens de la vie », assure le prêtre. Dans la salle résonnent les petits ronflements d’Élisabeth, qui s’est assoupie.
Messe de 11h chez les petites sœurs des pauvres
Vivre en relation avec les autres
Dans la matinée, Giuseppe a pris un cliché d’un parc qu’il repeint à présent dans son atelier. Sur la toile, une brume s’échappe de la pelouse éclairée par le soleil. Maintenant qu’il a du temps, il s’est découvert un talent. Il signe, dans le coin inférieur droit, des peintures très réalistes à l’acrylique et à l’huile. Sa dernière création est un petit oiseau, qui attend encore sa signature et une couche de vernis. Avec l’autorisation des résidents, Giuseppe a accroché des peintures dans le salon, le hall d’entrée et la chambre d’ami. « Une fois, j’ai tout descendu en bas et j’ai dit choisissez ceux que vous préférez sauf celui-là, car je l’ai promis à mon fils ». Cette peinture, adossée contre une armoire à terre, attend son nouveau propriétaire depuis deux mois. « Ça, quand les enfants deviennent grands, il y a toujours l’excuse du travail », soupire-t-il. En octobre, il participera au parcours des artistes de sa commune et exposera ses peintures pendant deux jours dans son salon. Une façon pour lui de participer à la vie sociale de son quartier.
Peintures réalisés par Giuseppe
À midi, un repas est servi dans le grand réfectoire au premier étage. Tous les résidents ne sont pas de la partie. Ceux avec moins d’autonomie mangent à leurs étages respectifs. Jeannine mange à la table numéro 4 avec trois amies qu’elle n’a pas choisies. Une sœur dans le coin du réfectoire agite une cloche et entame une prière dans un micro. « Au nom du père, du fils… ». Des bénévoles passent entre les tables pour prendre les commandes. Le menu est le même pour tous les résidents, mais les aliments peuvent être sélectionnés séparément. Sur un petit papier, les encadrants recueillent les demandes à l’aide de croix. Une croix (un peu), deux croix (normal), trois croix (beaucoup). Le vendredi c’est du poisson. Une annonce marque la fin du repas. Un tournoi de pétanque sur inscription est organisé avec les résidents de la maison Sainte-Monique jeudi prochain. Après le déjeuner, il leur arrive de rester parler jusqu’à 14h30 autour d’un café.
Perte d’autonomie
Le service, composé de bénévoles, de sœurs et d’aides-soignants, n’accueille pas les personnes atteintes de démence. Jeannine précise : « Si une personne développe cette condition ici, elle reste et reçoit des soins palliatifs. » Pour évaluer le niveau de dépendance des résidents, le service utilise l’échelle de Katz. Ne pourrait-on pas y voir un biais, puisqu’elle mesure la dépendance plutôt que l’autonomie du patient ? Selon l’Observatoire de la santé et du social, la Région de Bruxelles-Capitale compte une proportion plus importante de personnes âgées en maison de repos avec des niveaux de dépendance légère (profils O et A sur l’échelle de Katz) comparée aux autres régions. De plus, cette échelle influence le financement des maisons de repos : plus une personne est dépendante, plus l’établissement reçoit de fonds. Au sein de l’habitat partagé de Giuseppe, ce sont les résidents qui décident quand l’un d’eux devient trop dépendant. Une solidarité s’est instaurée entre eux. Contrairement aux maisons de repos, ils ne bénéficient pas d’une assistance médicale continue. Ainsi, chaque résident désigne un référent à son arrivée, qui prendra les décisions nécessaires en cas de besoin.
La présence de la famille
Giuseppe a des semaines bien chargées. Avec les transports à proximité, il a donné sa camionnette à son fils. Bénévole chez un collectionneur de vases depuis 3 ans, Giuseppe s’occupe aussi de l’informatique dans cette fondation au centre-ville. Un cours de peinture prévu tous les mercredis à Ixelles. Il assiste en outre à plusieurs événements culturels chaque semaine. Sur sa table, une dizaine de flyers témoigne de son goût pour la culture: La Monnaie, Flagey, le musée des instruments… Il se rend souvent aussi au consulat italien pour voir des pièces de théâtre ou prendre des livres à la bibliothèque. Da chambre, des livres d’arts (Turner, Van Gogh, Monet, etc.) sont soigneusement alignés sur une étagère blanche. Cette armoire, c’est son fils qui s’en est occupé. À son arrivée, Giuseppe a rafraîchi tous les murs de sa chambre et son fils l’a aidé à installer des meubles Ikea. « Ils sont beaucoup plus pratiques », dit-il. Le cousin de Jeannine aussi est passé chez Ikea. Elle ne savait pas où mettre ses chaussures et il lui a trouvé un meuble adapté. Quand elle était encore dans son lit à l’hôpital, c’est son cousin avec sa femme , sa nièce et son mari qui sont venus l’aider à aménager son nid. Jeannine occupe une petite chambre au quatrième, l’étage qui accueille les résidents les plus autonomes. « Quatrième étage, liberté chérie », dit-elle, ravie.
Dans le long couloir aux murs rose saumon, toutes sortes de cadres sont accrochés. Des photos de tulipes et de la dynastie. Au fond, la télévision trône au milieu d’un grand salon. Dans la salle à côté, une petite cuisine offre la possibilité aux résidents d’inviter et d’aller chercher du café toute la journée. Des chambres sont aussi disponibles pour accueillir les proches. Sa famille est déjà venue lui rendre visite avec des pistolets fourrés : « C’est sympa parce que c’est comme à la maison », trouve Jeannine. À l’entrée du bâtiment sont posés deux documents à compléter. L’un pour les visiteurs, l’autre pour les résidents. Date, prénom, heure sont demandés. « Tu fais ce que tu veux, mais tu dois prévenir que tu pars », dit-elle. Quand sa famille venait, elle prenait le linge sale et elle le ramenait propre. Maintenant elle a des étiquettes sur tous ses vêtements. C’est le personnel qui les lave. Elle continue de les repasser parce que ça la détend.
Vue de la chambre de Jeannine chez les petites soeurs des pauvresDans sa chambre, sur une petite table en bois, un petit frigo lui permet de garder au frais les restes de son petit déjeuner. Des rectangles de beurre, des Kiri et des grèves. Tous les matins à 8h, un chariot avec des thermos chauds passe le long du couloir. Chaque chambre a droit à un plateau. « Le couloir, c’est la rue du marché », dit-elle. Des aînés impatients viennent récupérer leur plateau avant que l’employé n’ait eu le temps de tout déposer.
Une vue sur le palais de justice depuis sa fenêtre. Un coin prière avec une rose dans une bouteille en verre. Une série d’étagères remplies de mystères. Lit médicalisé obligé. Les fils cachés sous le sommier et le perroquet calé dans un coin de sa chambre. Elle le ressortira quand ce sera le bon moment. Des coquetiers, des bougies d’anniversaire et des petits livres reçus d’êtres chers. Jeannine reste en peignoir jusqu’à 9h, aère son lit et prie un petit quart d’heure. « Ici, j’ai pris l’habitude d’apprécier mon lever ».
A l’heure ou le vieillissement de la population nous pousse à réinventer nos modes de vie, l’habitat partagé apparaît comme une alternative humaine et solidaire. Il permet à des personnes agées comme Jeanine et Giuseppe de maintenir leur autonomie tout en créant des liens. Ils sont le reflet d’une société qui tente de redonner à ses aînés une place active et valorisante. Parce que vieillir ne devrait jamais rimer avec effacement.
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Herstal éventrée, Herstal réconciliée ?
La ville de Herstal est éventrée par les travaux du tram. Vendredi 18 octobre, elle introduisait un double recours au Conseil d’Etat afin de tenter de relancer le projet. Malgré cela, le PS pourrait former une majorité avec le MR qui à initié son annulation.
Giro a ouvert sa pizzeria il y a 6 mois. Assis à la table de son restaurant fraîchement peint, il attend les clients. Pour rénover son commerce, le restaurateur a dû contracter deux crédits. Un mois après son ouverture, les travaux du tram ont commencé sur le boulevard juste devant la pizzéria. En voyant le boulevard s’ouvrir face aux pelleteuses, Giro se réjouissait du tram qui devait étendre sa clientèle : « Ça changerait le visage de la rue », explique-t-il. Mais l’arrêt des travaux pour une durée incertaine le met dans une situation indélicate : « Je n’ouvre même plus à midi, parce qu’il n’y a personne. Ces travaux rendent l’accès au restaurant plus compliqué, et diminuent les places de parking disponibles », déplore le restaurateur. Plus loin dans la rue, même écho chez un supermarché d’une grande chaîne : « Nos chauffeurs se perdent, et certains clients sont découragés à cause du détour qu’il faut faire pour venir chez nous », confie un responsable.
Pour rappel, le ministre de la mobilité François Desquesnes (membre du gouvernement MR-cdH) avait annoncé à la fin du mois d’août que le tram liégeois, qui doit entrer en circulation d’ici 2025, ne circulerait finalement pas jusque Herstal et Seraing. Deux lignes de bus prioritaires seront mises en place afin de le remplacer. Selon Frédéric Daerden, le bourgmestre socialiste fraîchement réélu à Herstal, cette décision affiche une vision court-termiste : « Si on réfléchit comme ça, on ne fait jamais rien », s’exclame-t-il. La ville de Herstal a donc décidé d’introduire ce vendredi un recours au conseil d’état afin de revenir sur la décision du gouvernement wallon. « Le tram a un vrai rôle pour favoriser les transports en communs, ce qui permettrait de diminuer la circulation déjà bien engorgée que ce soit en ville ou en périphérie. Je ne pense pas que de nouvelles lignes de bus répondent aux besoins de la population », développe le bourgmestre.
Vers une majorité PS-MR à Herstal ?
Ce dossier reste donc toujours en suspens, et les travaux toujours à l’arrêt. Il s’inscrit dans un contexte post-électoral compliqué. En effet, Frédéric Daerden est réélu pour la quatrième fois d’affilée avec 47,8% des voix pour 17 sièges, mais c’est la première fois qu’il n’obtient pas la majorité absolue (18 sièges ) à l’issue du scrutin. Il va donc devoir accueillir un partenaire – le MR ( 20,9% ) ou le PTB ( 31,3% ) – afin de former une majorité. Le bourgmestre socialiste s’est dit ouvert aux deux partis, ne fermant donc pas la porte au MR malgré l’annonce du gouvernement wallon MR-Engagés de ne pas prolonger le tram.
Pour lui, le projet du tram est un thème parmi beaucoup d’autres de gestion d’une ville. Ce point ne sera donc pas déterminant dans la décision de la future coalition. D’ailleurs, leur majorité actuelle inclut également des membres des “engagés” qui ont voté en faveur du recours. Reste à voir si cette future majorité aura le dernier mot dans ce dossier, afin de défendre une vision d’une métropole liégeoise plus durable tout en intégrant sa périphérie.
“La plus-value de ce tram, c’est de faire de Liège une métropole wallonne”
La ville d’Herstal n’est pas la seule à contester cette décision. La députée Ecolo au parlement wallon Veronica Cremasco a également déposé une motion à l’encontre du ministre Desquesnes. « Cette motion invite le ministre à venir rencontrer les habitants, les bourgmestres et les élus afin de mesurer les impacts de cette annulation. Elle demande également un dialogue avec les bureaux d’études impliqués depuis 15 ans sur ce dossier, comme les auteurs de projet du PUM ( plan urbain de mobilité de l’agglomération liégeoise ) », explique-t-elle. Pour la députée qui est par ailleurs ingénieure spécialisée en développement durable, il faut penser cette décision dans le cadre d’un projet de métropole liégeoise : « La plus-value de ce tram, c’est de faire de Liège une métropole wallonne, et cela ne se fera pas si le tram ne circule qu’à Liège même. Il faut nécessairement aller chercher les deux points principaux de l’agglomération, à savoir Herstal et Seraing. D’autant plus que des transports propres et structurants sont la colonne vertébrale d’une métropole ». La députée pointe également le coût environnemental de cette décision, qui serait de 5.000 tonnes de CO2 supplémentaires par an, selon l’ASBL The Shifters. De plus, le tram apporterait une nouvelle dynamique, et permettrait à de nombreux commerces et au marché immobilier de se développer : « On a besoin que les populations herstaliennes puissent se déplacer pour aller voir un spectacle dans la nouvelle salle de concert à Liège, on a besoin que nos étudiant.e.s puissent aller kotter à liège facilement ».
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Trahisons politiques aux élections communales
Arnaud Jaegers
Au lendemain des élections communales, les premières coalitions voient le jour, au prix de quelques trahisons. De Tournai à Rochefort en passant par Wavre, tous les coups sont permis en Belgique francophone, faute de règles. En Flandre, un nouveau système a été instauré donnant la main au parti arrivé en premier, ce qui limite les trahisons spectaculaires.
“Vous ne sortirez pas de là (l’hôtel de ville) vivants.” Sur la place de la ville à Rochefort, lundi 14 octobre, lendemain d’élections communales, des manifestants font entendre leur mécontentement. La cause de leur colère ? La liste citoyenne @venir citoyen, menée par l’ancienne bourgmestre Corine Mullens (MR), arrivée en première position, s’est vu reléguée dans l’opposition par les listes arrivant deuxième et troisième, respectivement MR-IC et Pour. Julien Defaux (MR-IC), bourgmestre sortant explique son choix : “On avait une volonté de ne pas travailler avec Mme Mullens car on savait que ça ne se passerait pas bien. On avait une envie de retrouver un collège serein et cohérent, où tout le monde se dit bonjour et où il n’y a pas de mépris.”
Démocratie proportionnelleN’est-ce pas anti-démocratique de ne pas laisser la main au parti ayant obtenu le plus de votes ?. “En Belgique, avec la démocratie proportionnelle, la question n’est pas d’avoir le plus de voix mais plutôt d’avoir une majorité qui représente une majorité de la population”, explique Thomas Legein, chercheur postdoctoral au sein du groupe de recherche DFUTUR de la VUB. “En ce sens les alliances après les résultats n’ont rien d’anti-démocratique, ce sont les règles du jeu.” Le bourgmestre de Rochefort ne le contredira pas. “On est sous un mécanisme d’une majorité représentative en Belgique, on représente 56% des votes avec les 2 groupes”, affirme Julien Defaux. “Ce n’est pas un choix facile à porter. Je ne suis pas insensible à l’aspect moral du choix, même si la démocratie et la loi nous l’autorisent”.
Voir le cinéma qui se passe suite aux résultats électoraux, ça n’améliore pas la confiance des citoyens envers les partis politiques et les institutions démocratiques.
Thomas Legein, chercheur spécialisé dans la politique belge.Autre exemple marquant, celui de Benoît Thoreau et des Engagés, qui, à Wavre, ont gagné leur pari. Dans le chef-lieu des libéraux et fief de la famille Michel, son parti a formé une coalition avec le PS et Écolo, reléguant dans l’opposition le MR, qui avait pourtant remporté le plus grand nombre de voix. Pour M. Thoreau, les citoyens ont exprimé leur envie de changement. “La pression populaire était énorme. Si on s’était remis avec le MR, on n’aurait pas pu exprimer le changement souhaité par les citoyens.” Benoît Thoreau, pourtant 3e sur la liste des Engagés, est le candidat qui a remporté le plus de voix de préférence de son parti et remporte, donc, le titre de bourgmestre.
Droit d’initiativeDe son côté, la Région flamande a décidé de modifier son système en instaurant un droit d’initiative, sur une durée de deux semaines, pour la liste ayant reçu le plus de voix. Le système est donc plus encadré qu’en Wallonie et à Bruxelles, où toutes les listes sont libres de négocier avec qui elles le souhaitent. Ce sont précisément ces mécanismes qui causent les remous de ces derniers jours suivant les résultats des élections communales ce 13 octobre. “Il y a moins d’histoires de trahisons en Flandre. L’idéal démocratique est respecté car la liste avec le plus de voix à l’initiative pour former sa majorité, ce qui empêche d’autres listes de faire des alliances dans son dos”, analyse Thomas Legein.
Direction le Hainaut et la ville de Tournai où, là aussi, les élections ont provoqué la stupeur: Paul-Olivier Delannois (PS), l’ancien bourgmestre arrivé en tête, a été évincé. “La nature humaine m’apprend tous les jours. Je pensais avoir tout vu, mais certains balaient leurs propres valeurs”, lâche-t-il. Lui et son parti avaient reçu le plus de voix, obtenant 15 sièges sur les 39 possibles. Le MR, Les Engagés et Écolo ont formé une coalition de 22 sièges.
Vers plus d’absentéisme ?Autre cas de figure: à Ixelles, l’ex-bourgmestre, Christos Doulkeridis (Écolo) a été exclu de la majorité alors que sa liste avait elle aussi remporté le plus grand nombre de voix. Cette fois, le MR, le PS et Les Engagés se sont entendus pour former une coalition. Doulkeridis a, dans la foulée, arrêté sa carrière politique. “Ces petits jeux politiques sont difficilement compréhensibles pour les citoyens.” explique-t-il à l’antenne de la RTBF.
Tous ces remous ne risquent-ils pas d’accentuer encore la désillusion à l’égard du politique ? “Voir le cinéma qui se passe suite aux résultats électoraux, ça ne va pas améliorer la confiance des citoyens envers les partis politiques et les institutions démocratiques”, estime Thomas Legein. Généraliser le régime adopté en Flandre pourrait contribuer à combler ce manque de confiance. “C’est une règle du jeu facile à accepter, de se dire que les gagnants peuvent négocier en premier. Est-ce qu’il faudrait la mettre en place en Wallonie et à Bruxelles ? Ça c’est une question politique”, conclut le chercheur.
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Veillées pour la Palestine (épisode 2)
Photo : Selemette HA
Que faire quand, sur les réseaux sociaux, des images d’enfants calcinés nous parviennent tous les jours de Gaza ? Swiper. Ou crier. À 3000 kms de l’effroi, Dalila et Shaker ont choisi de tordre le cou à l’impuissance en donnant leur voix à la cause palestinienne, tous les jours depuis le 17 octobre 2023, pendant une heure au moins. Mais entre la fatigue, la pression policière et la banalisation dans la société des morts civils au Proche-Orient, la lutte pour le cessez-le-feu se confond bientôt avec celle pour maintenir les veillées quotidiennes, devenues symbole d’espoir. Récit en deux volets d’une année de lutte en forme de montagnes russes émotionnelles.
Épisode 2 : Préserver le cri, coûte que coûteDéjà plus de trois mois, Dali crie tous les jours sans exception pour la Palestine. Ce soir de janvier, lors de la 89ème veillée, la militante hausse le ton : « réveillez-vous, là ! » Ses joues sont rouges, sa tête baissée comme un taureau prêt à charger. Elle fait le tour du drapeau d’un air pressé avant de céder le micro à Shaker. C’est la première fois qu’elle craque. Deux jours auparavant, elle partait aux aurores à la Haye pour soutenir la requête de l’Afrique du Sud auprès de la Cour Internationale de Justice dans le cadre d’éventuelles violations de la Convention sur le génocide d’Israël à Gaza. Sans cesse, on l’interpelle pour des photos, pour les actions à venir, sur les réseaux sociaux comme aux manifestations. Des manifestations, il y en a parfois trois dans la même journée. Elle est débordée. Mais ce n’est jamais assez. Elle parcourt alors la ville pour des actions de collages de stickers ou pour suivre des graffeurs. Jusqu’à 2 ou 3h du matin. Elle dort et s’alimente moins, elle est épuisée, physiquement et moralement. Quelques jours avant, une lettre recommandée lui inflige une amende de 350 euros pour avoir incité à la rébellion contre les forces de l’ordre, lors de l’épisode du Mont des Arts (lien vers l’épisode 1). La goutte d’eau, ses yeux en débordent. Alors ce soir-là, ce sont ses camarades aux slogans trop mous à son goût qui prennent : « dire ‟Palestine vivra, Palestine vaincra” sans la rage, ça sert à rien. J’veux que ça sorte des tripes, jusqu’à s’en rendre malade. Pour dire aux Palestiniens: ‟on est avec vous, on vous soutient et on ne vous lâchera pas” ! » Sinon, « autant faire une minute de silence ! »
« Toujours « Palestine Palestine”, il n’y a que ça dans ta vie »On l’a pourtant prévenu : « Dalila t’as l’air à bout, prends toi une pause, reviens nous en force ». Mais la jeune militante qui n’a jamais raté plus de deux veillées de suite en est incapable. Ses proches lui disent qu’elle en fait trop, « toujours ‟Palestine Palestine”, il n’y a que ça dans ta vie ». Des personnes qui suivaient ses réseaux sociaux se sont retirées, elle perd aussi une amie proche. Elle a bien essayé de déconnecter, une fois. Mais elle ne savait pas quoi faire. « Si je chante, je vais me sentir coupable, pourquoi je me suis amusée ? » Elle est prise en étau entre deux injustices, le « risque de nettoyage ethnique » à Gaza et le fait qu’à Bruxelles, on le banalise. La manifestation nationale du 21 janvier attire 20.000 personnes selon les organisateurs, moitié moins que celles organisées fin 2023. « C’est de pire en pire et on est moins nombreux, ça devrait être l’inverse, ça me frustre ». Les journalistes ne viennent plus à Gare Centrale, lassés du même spectacle quotidien. Souvent, elle se remémore les premières veillées d’octobre, la chaude ambiance de la Bourse noire de monde. « On pourrait ramener le cadavre d’un bébé palestinien… » Le policier avait raison et ça la tue (voir l’épisode 1). Elle regarde les passants s’émerveiller du Bright Festival qui illumine les rues de la Capitale. « J’ai envie de les secouer, Gaza c’est pas un film ! »
Dalila lance un slogan (mars 2023). Photo : David McnIls nous ont déclaré la guerre
(Réveillez-vous) peuple du monde et enfant de la Terre
(Réveillez-vous) avant le point de non-retour
On aura b’soin d’tout l’monde, tout l’monde, tout l’monde, tout l’monde
Ce refrain de la rappeuse Keny Arkana, elle y pense souvent. Dali ne partage plus assez de la même réalité que ses semblables pour les comprendre, et inversement. Il y a comme deux mondes. Celui de ses proches interloqués quand elle refuse un Coca car elle voit dans l’entreprise, comme Carrefour ou McDonald’s, un complice des crimes d’Israël. Et celui de Dalila qui, dans le rouge du soda américain, ne voit que du sang, « j’ai des flashs, toujours des flashs ». « On me dit que je suis extrême mais pour moi être extrême c’est tuer des gens ». Alors crier quotidiennement pour la Palestine pendant une heure est un minimum : « Dès fois je me reconnais plus, je me balade à Grand Place avec mon amie et d’un coup je sors mon drapeau et je commence à crier “free Palestine !” » « Tu donnes tout, ça peut rendre dingue » reconnait-elle. Mais moins que de ne rien faire : « imagine si tous les soirs je regardais des vidéos et des photos atroces sans pouvoir m’exprimer, sans pouvoir dire ma rage ». Plus facile que de ne rien faire, crier tous les jours reste du temps et de l’énergie. Aux veillées, plus beaucoup n’en ont. Shaker, en inlassable leader vocal, harangue ses troupes : « il n’y a que moi qui crie, criez avec moi ! » Dalila perd sa voix, la récupère deux jours, la reperd. Comme son espoir d’une issue favorable à Gaza. Sa voix a complètement changé, elle ne sera plus jamais comme avant.
« On est des menteurs »Gaza est devenu « un lieu de mort et de désespoir » selon Martin Griffith, secrétaire général adjoint de l’ONU. Après Gaza-ville et Khan Younès, Benyamin Netanyahou promet d’envahir Rafah. Le 29 février 2024, le cap des 30.000 morts palestiniens est dépassé. Des enfants meurent de faim. Difficile de garder espoir pour les militants de la paix. L’impuissance est généralisée et forme un régime écrasant. Aux États-Unis, un soldat s’immole devant l’ambassade d’Israël pour protester contre le « génocide » en Palestine. Aux veillées, les tensions s’accumulent, avec les policiers ou entre Palestiniens. Ces derniers, à bout, n’en peuvent plus. Ils ne s’expriment plus que par la colère, plus personne ne les comprend. Dali exprime régulièrement sa rage en story Instagram « vous n’êtes pas humains, vous êtes tous complices ». Elle n’ose plus finir ses phrases : « Dès fois t’as juste envie… J’ai des pulsions, des réflexions, je me dis… On a presque tout fait. Jusqu’où on va aller pour que ça s’arrête ? » Beaucoup de militants ont lâché. Pour certains, crier tous les jours ne fait plus sens.
Shaker lors d’une Marche pour la Palestine (Ixelles, avril 2024). Photo : Anja SndOn se questionne sur la poursuite des veillées. La réponse de Shaker fuse : « non, on sera là tous les jours ». Dali approuve. La mobilisation quotidienne continue autour d’un groupe d’historiques. La fatigue ou la colère, aucun sentiment ne semble avoir d’emprise sur Shaker. « Dans la rue on peut sourire aux gens mais chez nous… On est des menteurs ! », rigole son ami Osama, dont la famille a réussi à fuir en Égypte. À la maison c’est différent. Shaker s’informe en temps réel de la situation à Gaza dans la crainte permanente pour sa famille. Le plus difficile c’est quand Internet a été coupé là-bas, le laissant sans nouvelle. Derrière ses yeux toujours pétillants, il reconnait qu’aller bien est impossible. Mais de tout ça, il ne parle finalement que très peu aux veillées, préférant largement mettre en avant le bon cœur de ses amis palestiniens et bruxellois, qu’il aime voir danser ensemble la dabkeh (danse traditionnelle palestinienne). Il se sent mieux ici qu’à Vienne. Dalila aussi s’est faite des amis. Le jour de son anniversaire, ils lui offrent un drapeau palestinien signé. Parmi les autographes, celle d’Émilie qui lors d’une veillée d’hiver, distribuait des stickers, et dont Dalila est tombée amoureuse. « La Palestine n’a pas que du mauvais » sourit-elle.
« On aimerait être plus »En attendant, les médias reparlent un peu de Gaza, notamment autour du « massacre de la farine », cette distribution alimentaire pendant laquelle les forces israéliennes ont ouvert le feu, tuant 118 civils palestiniens et en blessant plus de 700. Devant la gare pour autant, ils ne sont toujours que quelques dizaines à continuer de se rassembler tous les jours, désignées sobrement dans le milieu comme « le groupe de Gare Centrale ». Il est encore question d’arrêter, au moment du ramadan – l’horaire n’arrangent pas les musulmans, qui à cette heure, préparent les repas du soir. La détermination de Shaker et Dalila n’est plus à démontrer : les veillées continueront, mais de 16 à 17h. Pendant un mois, les slogans trouveront encore moins d’écho au carrefour de l’Europe.
Sous le long drapeau palestinien (Gare Centrale, mai 2024). Photo : Selemette HAÇa n’empêche pas cette jeune militante de croire encore à l’amplification du mouvement. Elle se saisit du mégaphone, alors que le vent souffle sous le long drapeau palestinien : « Tsahal a tué sept humanitaires de l’ONG World Central Kitchen. Cette armée qui vient de détruire l’hôpital Al-Shifa pendant une opération de 14 jours. Malgré le contexte, on est bien peu aujourd’hui. On aimerait être plus ». Plus de cinq mois qu’ils se réunissent ici tous les jours et l’espoir d’éveiller les passants de Gare Centrale sur le drame humanitaire à Gaza semble être intact. Le rassemblement va toucher à sa fin. Deux jeunes femmes passent à côté, s’égosillent ironiquement : « manifestation, manifestation ! » Shaker se ressaisit du micro. Comme un chanteur en concert, il termine par son tube, le « Yoya ». 17h04, deux policiers viennent au drapeau, « c’est l’heure ». Le jeune gazaoui s’éponge le front et la nuque, allume une cigarette. Dalila semble plus sereine que jamais, Émilie lui a offert une bague de promesse, il y a quelques jours. On plie le drapeau. « À demain ».
Un peu plus d’un mois plus tard, le contexte des élections européennes et la vague d’occupation des universités par les étudiants américains et français pour protester contre le massacre à Gaza remet le sujet à la Une. À Bruxelles, le ramadan terminé, les veillées ont repris leur horaire habituel, sans que leur fréquentation dépasse la trentaine de militants. Mais ce mardi 7 mai, c’est différent. Au Proche-Orient, les négociations pour le cessez-le-feu patinent. Surtout, Netanyahou met sa menace d’opération terrestre à exécution concernant Rafah où sont réfugiés plus d’un million de civils palestiniens. Le slogan « All Eyes on Rafah » fleurit sur les réseaux sociaux des associations pro-palestiniennes. C’est au même moment que des étudiants décident d’occuper le bâtiment B du campus Solbosch de l’ULB. L’offensive à Rafah permet au mouvement bruxellois de largement remobiliser. Ainsi, et alors que ça fait longtemps que les veillées ne bénéficiaient plus de « publicité », un visuel est partagé sur Instagram, invitant à venir manifester lors de la veillée du soir, à 18h, à Gare Centrale. C’est la 204ème d’affilée.
C’est devant un carrefour de l’Europe débordant d’âmes que depuis les épaules d’Osama, Shaker lance les slogans ce soir-là, la tête enveloppée dans un keffieh rouge, celui des grands jours. La mobilisation est telle que la police la laisse exceptionnellement durer jusqu’à 20h. Inespéré, on avait plus vu une veillée comme ça depuis novembre. Dalila, elle, serre les dents. C’est sur son smartphone qu’elle découvre l’ampleur de la mobilisation, depuis la maison de repos où elle travaille désormais. Elle qui n’en a quasi pas raté une. Elle se remémore les fois où c’est sous la neige qu’ils criaient, à dix, les slogans. « Vous étiez où pendant 7 mois ? » se répète-t-elle amèrement.
« C’est comme si on n’avait rien fait »« Incitation à la discrimination, à la haine, à la violence ou à la ségrégation à l’égard d’une personne ou d’un groupe ». Ce fait concernant une infraction punissable d’une peine privative de liberté, Dalila découvre qu’il lui est reproché par un courrier de la police daté du 29 août. Ils seraient plus de 90 personnes à avoir reçu une telle convocation pour audition, dans le cadre de ce qui ressemble à une enquête pénale de grande ampleur sur les militants pour la Palestine. Certains, mais pas tous, avaient participé à l’occupation du bâtiment B de l’ULB (renommé « Bâtiment Walid Daqqa ») pour réclamer la fin des partenariats entre l’université et l’État israélien, occupation finalement expulsée par la police le 25 juin. Si le fond du dossier n’est pas encore connu, Amnesty International Belgique et d’autres ONG s’inquiètent des mesures répressives visant le mouvement pro-palestinien belge eu égard au droit de protester en Belgique, rappelant notamment que le port de signes de soutien à la Palestine (drapeau, keffieh, etc.) est couvert par la liberté d’expression alors même que nombre de militants se sont vu devoir les retirer à la fin des manifestations, sous couvert d’une « neutralité de l’espace public ». « On a l’impression qu’on a un fusil ou un couteau. C’est juste un drapeau les gars », résume Dalila qui vient de se tatouer sur le bras sa phrase fétiche : « l’injustice de la justice ».
Votre rêve n’était-il pas de devenir policière ?
Un policier à Dalila Gare Centrale, 19h, la police s’assure que la veillée se termine (octobre 2024). Photo : @espacevocationCanon à eau, arrestations violentes, gaz lacrymogène, matraques. Tout l’été, la page Instagram « Dali Citoyenne Reporter » se colore de bleu, celui de l’uniforme policier. Ce jour-là, Dalila et d’autres militants souhaitent manifester à Bourse, comme tous les vendredis, cette fois en l’absence d’autorisation, « Plaisirs d’Été » oblige. La police procède à une dizaine d’arrestations avant même le début du rassemblement. « Votre rêve n’était-il pas de devenir policière ? » Intimidée, Dali découvre que le policier qui lui parle sait beaucoup de choses sur elle. Le jour même, elle reconnait un « RG » (Renseignement Généraux) dans les vues de sa story Instagram. Dali voit dans cette pression une manière de briser le mouvement, « de nous faire peur ». Et d’une certaine façon, ça marche. En parallèle de la manifestation avortée à Bourse, le groupe habituel des veillées se rassemble Place de l’Albertine, lieu que la police avait autorisé. Entre ceux qui respectent les ordres et les autres, une opposition se forme. Alors qu’il ne devrait former qu’yad wahida (une seule main, en arabe), le mouvement pro-palestinien se fragmente, parfois pour des querelles d’égo.
Rassemblement « One year of genocide. Veillée pour la Palestine et le Liban » (Bourse, 7 octobre 2024). Photo : David McnIl en faudra, malgré tout, davantage pour faire taire ce cri. Les mobilisations se poursuivent. Si vous passez aujourd’hui à Gare Centrale, à 18h, vous pourrez toujours voir « papy » et sa pancarte sur laquelle « Assange » est maintenant barré, derrière le « Free ». Vous pourrez encore entendre la voix perçante de Shaker. Mais plus celle de Dali. En un an, plus de 42.000 palestiniens ont été tués à Gaza, plus d’enfants et de femmes que lors de n’importe quelle autre guerre de ces 20 dernières années, selon Oxfam. La revue scientifique The Lancet estime que le bilan des morts en Palestine est plus proche de 186 000, chiffre jugé cohérent par le président de Médecins du monde – nombres froids pour des corps humains encore chauds. « Tout ce qu’on a donné, c’est comme si on n’avait rien fait ». Dalila n’a plus envie de voir ses amis, l’impression qu’elle est devenue une sans-cœur. Elle poursuit son engagement pour la Palestine dès qu’elle le peut, mais son ultime souhait, « c’est que tout ça s’arrête ».
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Veillées pour la Palestine (épisode 1)
Photo : Maryan SAID
Que faire quand sur les réseaux sociaux, des images d’enfants calcinés parviennent tous les jours de Gaza ? Swiper. Ou crier. À 3000 kilomètres de l’effroi, Dalila et Shaker ont choisi de tordre le cou à l’impuissance en donnant leur voix à la cause palestinienne, tous les jours depuis le 17 octobre 2023, pendant une heure au moins. Mais entre la fatigue, la pression policière et la banalisation dans la société des morts civils au Proche-Orient, la lutte pour le cessez-le-feu se confond bientôt avec celle pour maintenir les veillées quotidiennes, devenues symbole d’espoir. Récit en deux volets d’une année de lutte en forme de montagnes russes émotionnelles.
Épisode 1 : contre l’impuissance, les veillées quotidiennes« Israël assassine les enfants de Palestine ! » Devant la Gare Centrale de Bruxelles, aujourd’hui, ils ne sont qu’une dizaine de militants à répéter le slogan lancé par Dalila, tous rassemblés autour d’un long drapeau palestinien qui prend le vent comme une voile de bateau. Il y a les habitués, dont Thierry, dit « papy », « Free Julien Assange » sur le sac à dos, un drapeau sud-africain dans la main. Sur le côté, un livreur Deliveroo observe en attendant sa prochaine commande. L’effet Larsen fait sourire la mère de cette fillette qui se bouche les oreilles. Nous sommes le 2 avril. Près de 14 000 enfants ont été tués à Gaza sous les bombes israéliennes. Dalila crie toujours – son poing libre s’agite dans tous les sens. Les slogans s’enchainent sans pause, l’énergie du petit groupe ne doit pas retomber. Autour de l’attroupement, on se presse de rejoindre son transport, il est 16h, le carrefour de l’Europe fourmille. Et sursaute soudainement quand Shaker se saisit du micro : « de Bruxelles à Gaza ? » « Résistance, résistance », lui répond la petite assemblée. Le jeune homme se déplace frénétiquement autour du drapeau pour aller chercher le plus d’écho à ses slogans. « De Bruxelles à Gaza ? », répète-t-il sans micro. « Résistance, résistance ! », lui répond-on plus franchement. Ce carrefour semble être sa scène. C’est le 169ème jour d’affilée qu’il s’y produit.
Face à l’horreur : crier tous les joursSix mois avant, Dali ne se doutait pas qu’elle allait former, avec Shaker, un duo vocal infatigable. Le 17 octobre 2023 se produit une explosion dans la cour de l’hôpital Al-Ahli Arabi, au centre de la ville de Gaza. Des dizaines de palestiniens y périssent. Shaker, originaire de Rafah, dans le sud de la bande, est arrivé à Bruxelles il y a un an, après cinq ans passés à Vienne. Le trentenaire ressent le besoin de faire quelque chose. Il passe un coup de fil à des amis rencontrés il y a quelques mois au 91 rue de la Loi, bâtiment qu’il occupait avec d’autres demandeurs d’asile. Avec eux et d’autres comme Tahsin Zaki, militant depuis vingt ans à la Communauté Palestinienne en Belgique et au Luxembourg et Riet Dhont, ancienne conseillère communale à la ville de Bruxelles (PTB), Shaker initie les premières veillées. À Bruxelles circule l’invitation à venir pleurer les victimes de l’hôpital, « chaque soir d’aujourd’hui à dimanche, à 19h, place de la Bourse. Apportez des bougies. » C’est trois jours après le premier rassemblement que Dalila s’y greffe. Ça fait déjà un moment qu’elle suit le mouvement pro-palestinien bruxellois. À 24 ans, la belge d’origine marocaine se définit comme citoyenne reporter. Gilets jaunes, luttes des sans-papiers ou pour le droit des femmes et des LGBT+, c’est le combat contre l’injustice qu’elle a à cœur et qu’elle documente sur sa page Facebook. Mais quand elle se rend à la veillée pour la première fois, Dali a du mal à rester spectatrice. Ça tombe bien. « Tiens, tiens », fait Ibrahim en lui tendant le micro : « vas-y, fais des slogans en français ! » Elle s’en saisit, et ne le lâchera plus.
Dès que tu ouvres ton Insta tu vois des images qui t’arrachent le cœur.
Dalila Dalila sur les épaules de Shaker (Bourse, novembre 2023).Elle se lie d’amitié avec Dounia et Mohamed. Avec Shaker aussi, qui la remercie pour son engagement. Les Instagram s’échangent, dessus les photos et vidéos des veillées. Dali ne reconnait pas sa rage, ce poing qui s’agite quand elle crie les slogans. Depuis l’attaque du Hamas ayant tué 1.170 personnes dans le sud d’Israël, majoritairement des civils, les « animaux humains » que combattent en riposte l’État hébreu et son ministre de la Défense Yoav Gallant prennent aussi des visages d’enfants. Ces visages, les réseaux sociaux de Dalila en sont remplis : « dès que tu ouvres ton Insta tu vois des images qui t’arrachent le cœur. » Corps d’une petite fille coupé en deux, ses organes apparents. Sacs de morceaux de chairs humaines. Visages au voile poussiéreux troué par le sang, partout du sang, des sacs mortuaires blancs, des larmes de mamans. Dali ouvre frénétiquement les stories de Motaz Azaiza, Bisan Owda ou de Wael Al Dahdouh, des journalistes et habitants de Gaza. Elle en cauchemarde : « t’as pas l’impression que ton cerveau se met une fois en pause. » Parfois on se prévient entre militants, « trigger warning il y a une vidéo très violente dans cette story ». Jamais les réseaux sociaux n’ont paru si peu virtuels, montrant une réalité déshumanisée, innommable, tétanisante. Les uns swipent, Dali s’y confronte. C’est là qu’elle puise la force qu’elle met le soir derrière le micro : « je ressens tout à 100%, j’ai envie de faire ressentir ça au gens. »
Les premières semaines, l’émotion collective est à son paroxysme à Bruxelles. Les veillées pour la Palestine s’installent quotidiennement avec la promesse de poursuivre jusqu’au cessez-le-feu. Chaque soir pendant une heure, la Bourse est noire de monde. Certains crient, d’autres pleurent, souvent on fait les deux. Kofia, Julia Boutros ou Mohammed Assaf, on y joue de la musique arabe. À la fin de chaque rassemblement, une bande son fait entendre des cris déchirants, ceux d’enfants gazaouis, avant de se taire pour une minute de silence. De la tristesse à la colère, le son du baffle devient le moyen de ne pas refouler ses émotions. Entre espace de recueillement pour les victimes et de visibilité pour la cause palestinienne, le lieu agrège les fonctions pour n’en garder qu’une : face à l’horreur, crier, tous les jours. Pendant un mois du moins. Les « Plaisirs d’Hiver » prennent leur quartier à Bourse, les veillées sont priées de s’éloigner de la vue des touristes.
Des bougies sont allumées en hommage aux victimes palestiniennes (Gare Centrale, décembre 2023). Photo : Maryan SAID « Je sais que si je lâche, c’est foutu. »Hors de question d’arrêter les veillées pour autant, la paix n’est pas à l’ordre du jour à Gaza. Pire, après deux mois de guerre, l’ONU parle de point de rupture concernant le système humanitaire local. L’Union européenne reste divisée et impuissante alors qu’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU dénonce la « punition collective » infligée aux palestiniens. 18.000 sont tués. Parmi eux, la sœur de Shaker. Il culpabilise. D’être, lui, vivant. De ne pas pouvoir aider financièrement sa famille à Gaza. C’est maintenant à 18h et devant la Gare Centrale (le vendredi à Bourse) qu’il crie quotidiennement avec ses amis et une ardeur décuplée. Conscientiser sur le sort des gazaouis est devenu son obsession, sa voix la seule manière d’aider les siens. Il a étudié l’informatique à Gaza mais son anglais est encore trop approximatif pour trouver un travail en Belgique. Sans papier depuis un an, c’est encore plus compliqué. Chaque manifestation est risquée, la police l’a à l’œil. Mais pour lui et d’autres réfugiés palestiniens, les veillées sont devenues essentielles car arrachées à des quotidiens stressants et souvent ennuyeux au sein des centres d’accueil. Certains font l’aller-retour tous les jours depuis Liège. On se douche, on se prépare, on va quelque part – on a un rendez-vous. Shaker rayonne chaque soir, conscient que de son énergie peut dépendre celle des autres Palestiniens. Dalila se souvient de la force qu’il dégage quand il entonne pour la première fois, solo, le « Yoya ». C’est maintenant tout un chœur qui répond à la voix perçante de Shaker. L’une de ces phrases résume à elle seule le chant devenu le préféré des veillées : « ils ont tué nos enfants, pourquoi on devrait se taire ? »
Vous n’avez qu’à me mettre en cellule !
Dalila Shaker à Gare Centrale (novembre 2013). Photo : Maryan SAIDTandis que l’hiver s’installe, un noyau dur se forme aux veillées autour duquel la foule est de moins en moins compacte, préférant se déplacer aux grandes manifestations nationales. Même la police en a assez d’être là tous les jours. Dalila redouble de détermination : « moi j’ai pas envie de lâcher, j’ai envie d’être là tous les jours, de continuer, que ça ne s’arrête pas ! » Que l’émotion collective autour de Gaza retombe, Dali ne peut l’entendre, elle qui embrasse tellement la cause qu’elle ne se voit pas travailler à côté de son engagement, malgré le besoin d’argent. Boulot, métro, dodo, c’est pas son truc. Elle a besoin d’un sens et actuellement, elle ne le trouve nulle part ailleurs qu’à Gare Centrale, fière de porter en cape le drapeau de ce peuple qui résiste : « je sais que si je lâche, c’est foutu. » Dalila est du genre butée : « depuis toute petite, ma couleur préférée c’est le rouge, j’ai jamais changé d’avis. Mes animaux préférés sont le lion et le dauphin, j’ai jamais changé. » Elle a pourtant transigé une fois, sur son rêve de gosse, celui de devenir policière. Défendre l’étranger, la veuve et l’orphelin ? Si seulement, « c’est juste une illusion », « l’injustice de la justice » comme elle dit tout le temps. Et la pression policière qui se fait plus forte sur le mouvement depuis son déménagement à Gare Centrale ne risque pas de refermer sa blessure originelle. À 19h pile, tout doit être rangé, l’attroupement dispersé, les drapeaux palestiniens effacés. Dalila pense aux drapeaux ukrainiens déployés sur les édifices publics après l’invasion russe : « on m’a demandé d’enlever ma casquette avec écrit « Palestine », c’est deux poids deux mesures ». Elle passe même quelques heures entre les murs du commissariat de la rue Royale lorsque ce soir-là, les Palestiniens décident de poursuivre la veillée au Mont des Arts, passé 19h. Pour que ça ne dégénère pas, Dali réussit à négocier avec eux leur retour à Gare Centrale où les policiers les encerclent finalement. La jeune militante se sent trahie et coupable : « vous n’avez qu’à me mettre en cellule ! » crie-t-elle avant de ressentir la pression d’un bouclier policier. Son engagement pour la Palestine devient presque sacrificiel. À Bruxelles, la lutte des militants pour visibiliser le sort des Gazaouis se confond avec l’effort de continuer à faire vivre les veillées quotidiennes, malgré l’inexorable chute de leur fréquentation.
Dalila à Gare Centrale (janvier 2024). « Mais pourquoi vous faites ça ? »« C’est pas en chantant que vous allez arriver à quelque chose » pestent certains. Ne faudrait-il pas davantage s’adresser aux politiques ? Certaines associations pro-palestiniennes bruxelloises, démultipliées depuis le 7 octobre, ont une approche moins « apolitique ». Mais aux veillées, peu de chance de voir des drapeaux partisans. Refusant qu’on lui dise ce qu’il doit faire, Shaker résume : « Je suis Shaker, je ne soutiens pas Samidoun (réseau international de solidarité avec les prisonniers palestiniens dont le porte-parole est fiché comme « prédicateur de haine » par les renseignements belges), je ne soutiens pas le PTB, je soutiens la Palestine, juste la Palestine ». Dans un débat public inflammable sur le sujet où se côtoient vrais racismes et accusations discréditantes d’antisémitisme ou de terrorisme, l’indépendance de Shaker est aussi comprise comme une stratégie au service d’une chose : qu’on parle du drame en Palestine, et rien d’autre. « J’ai besoin que tout le monde sache ce qu’il se passe à Gaza, qu’ils comprennent ce territoire autrement que comme un bastion terroriste mais comme hébergeant un peuple qui a des besoins », poursuit le palestinien. Si les slogans se tournent surtout vers les citoyens, c’est parce qu’il est lucide sur la capacité de la Belgique à agir au Proche-Orient. Comment pourrait-elle agir là-bas alors qu’elle laisse les réfugiés gazaouis dormir dans ses rues ? Ami de Shaker, Osama, compare son cas de sans-papier avec ceux des Ukrainiens mieux lotis, « pas de papiers, pas de passeport, pas de carte d’identité, pas de travail, pas d’argent, je n’ai rien. Le gouvernement est raciste. » Dalila est consciente qu’essayer d’ouvrir les yeux des passants de Gare Centrale prend du temps. En attendant, elle vise leurs oreilles : « les gens entendent nos slogans, peut-être qu’ils vont se renseigner après, on sait pas… » Et « même si c’est une personne sur cent, on a déjà gagné au moins un petit truc. »
Bâtiment Berlaymont (Commission Européenne) tagué (février 2024). Photo : DalilaEn février, plus de 26.000 palestiniens, civils en grande majorité, ont été tués par Tsahal. Les policiers rigolent, l’un fait : « mais pourquoi vous faites ça ? » Crier ne suffit plus. Dalila frotte à l’eau froide le mur du Berlaymont, encore haletante de la course poursuite. Cette question tourne en boucle dans sa tête alors que s’efface difficilement le graffiti fraichement dessiné sur le siège de la Commission européenne : « FREE PALESTINE, EU SHAME ON YOU ». Le lendemain, un Conseil européen extraordinaire se réunit ici. C’est pour dénoncer l’inaction de l’Union européenne à Gaza qu’elle a suivi cette nuit-là un activiste grapheur, tous deux dénoncés à la police par un restaurateur voisin. Les photos qu’elle a prises des tags apparaitront sur sa page Facebook Dali Live. Les conclusions du Conseil évoquent le cadre financier pluriannuel et le soutien sans faille à l’Ukraine. Une déclaration réaffirme sa condamnation de l’attaque terroriste du Hamas tout en insistant fermement sur le droit d’Israël de se défendre, dans le respect du droit international et humanitaire. « On a beau crier de toutes nos forces, vous ne nous entendez pas » répond-elle finalement au policier qui, en retour, assène : « mais vous pourriez ramenez le cadavre d’un bébé palestinien devant la Commission qu’elle ne ferait rien de plus. »
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